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Raiatea > Tonga

La ligne de flottaison bien rabaissée par les vivres offerts par Callipyge (avec encore une livraison à bout de gaffe de dernière minute !), nous avons quitté Raiatea et la Polynésie Française le mercredi 27 juillet, direction les Tonga. A priori la plus longue de nos dernières navigations, car, contrairement à la plupart des plaisanciers, nous ne nous arrêterons pas en chemin aux îles Cook. Il y a à cela plusieurs raisons. D’abord, on accueille un renforcement d’équipage mi-août aux Tonga, et compte-tenu de la durée de navigation, on ne pourrait se permettre qu’une escale d’une semaine aux Cook. C’est trop peu : on a découvert qu’on profitait bien plus des îles en y restant, en prenant le temps de les visiter tranquillement et d’y rencontrer des gens. Moins d’escales, mais plus de temps aux escales, donc. D’autre part, les formalités douanières coûtent cher, et on en a marre de casser le petit cochon à chaque escale. On n’a pas vraiment le choix (même si c’est très tentant des fois de zapper des formalités inutiles et dispendieuses), mais on peut réduire un peu la cicatrice du petit cochon en visitant un peu moins de pays.

Et puis on ira aux Cook une prochaine fois, peut-être…

Bref, nous quittons donc le lagon de Raiatea, moitié à la voile, moitié au moteur : on doit tirer des bords, mais vus le courant et la largeur du chenal Dédé le XUD est bienvenu pour nous aider à ne pas faire des bords carrés !

Première nuit au travers après avoir magnifiquement snobé Bora-Bora dont nous avons seulement aperçu la silhouette au loin, Schnaps avance bien sur une mer quasiment plate et est calé sous les étoiles, avant de passer au grand largue dans une houle croisée beaucoup moins confortable. Quelques heures plus tard, la GV est affalée et Corentin le n°1 est hissé et tangonné pour mettre deux voiles d’avant en mode papillon. C’est plus stable et donc plus facile à barrer pour Raymond le régulateur d’allure et une fois que c’est mis en place, on n’a presque plus besoin d’empanner pour faire route directe vent dans le dos ou presque (entre 150 et 180° en pratique). Certes, si le vent tourne, c’est un peu long d’empanner, il faut enrouler le génois, détangonner le n°1, le retangonner de l’autre côté, redérouler le génois… Mais si le vent forcit pendant un grain, pas besoin de grandes manœuvres : on enroule un bout de génois et puis voilà.

Et oui, on devient de plus en plus flemmards. C’est qu’en mer, on est un peu mous. Les deux premiers jours pour moi, à cause du léger mal de mer qui se traduit par un engourdissement passif, mes principales activités étant le sommeil et la digestion des mets préparés par Tomtom. Les jours suivants, nos activités se répètent selon un rythme assez lent et reposant : faire des points dans le livre de bord, enrouler un bout de génois, tirer la chevillette de Raymond le régulateur d’allure pour le remettre sur la bonne voie, jeter un œil à notre trace, bouquiner, dormir, bouquiner, dormir, prendre une douche sur la jupe, manger… Evidemment si le temps se gâte, c’est un peu différent, mais sur cette nav-ci on a eu la chance d’avoir plutôt une météo favorable.

Tout se passait tellement bien qu’on a décidé de tester les leurres que Callipyge nous a donnés. Et de un ! Hippolyte, un mahi-mahi d’un peu plus d’1m et 7 kg, dégusté entre autres juste poêlé à l’huile de sésame et parsemé de graines de sésame (ça faisait aussi partie du lot Callipyge, avec la recette) : un délice. On a hésité le lendemain à manger du poulet de la mer en la personne d’un fou égaré dans notre cockpit, mais on a abandonné l’idée car il aurait fallu le plumer, on l’a simplement aidé à reprendre son vol.

Puis le vent s’est ramolli (après 6 jours tout de même, ce qui nous a bien aidé) alors qu’on était assez proches d’un atoll complètement immergé au milieu de rien, Beveridge Reef, représenté par un point sur les cartes dont la position n’est pas assurée (on l’a vu 3 milles au nord-est une fois, 5 milles à l’ouest une autre fois, nous prévient-on). Concrètement, on commence par entendre les vagues s’écraser sur le récif, puis on voit la houle former de magnifiques monstres bleus dans lesquels on n’a aucune envie de se retrouver et qui entourent un lagon peu profond d’un bleu très clair et lumineux. Mais pas un bout de sable, pas un cocotier : rien n’émerge si ce n’est une épave égarée là depuis un bout de temps.

L’idée de départ était simplement de ne pas approcher de trop près Beveridge Reef, mais finalement, comme les prévisions météo des GRIB nous annonçaient encore de la pétole puis des passages de fronts très humides, on a décidé d’explorer le récif. Les instructions nautiques nous annonçaient une passe très large au SW, on l’a donc cherchée jusqu’à la trouver à l’ouest.

vaguesBeveridge.jpg

Les rouleaux qui cassent sur le récif ... au beau milieu de l'océan !

Pour ceux qui voudraient y aller, on s’est aperçu après-coup qu’il y avait des tas d’infos disponibles sur le net. Ici par exemple. Mais nous on a fait les super-explorateurs parce qu’on avait juste 2 lignes sur les instructions nautiques et pas d’internet à bord Smile .

Enfin on fait les malins, après-coup, mais on n’en menait pas large à l’approche d’un récif sur lequel on avait aussi peu d’informations… Et pourtant, la passe est très profonde, très large, on avait bien goupillé les horaires de la marée, et ça s’est très bien passé, presque plus facilement que dans d’autres lagons cartographiés. On a fini par jeter l’ancre par 5 m de fond, dans du sable parsemé de quelques petites patates de corail.

On se faisait une joie d’aller voir les poissons, peut-être même de nager en direction du récif pour trouver, qui sait, des langoustes ou du poulpe (le poulpe c’est ma dernière lubie, je veux attraper un poulpe). Mais le courant était tellement fort là où on a mouillé (dans la partie sud-ouest vu qu’on attendait du vent de cette direction) qu’on s’est contentés de nager en direction de l’ancre et d’explorer les 3 patates sous Schnaps dans une eau transparente au point d’y voir à 30 mètres. Peu de poissons, mais de jolis bénitiers arborant des rouges à lèvres multicolores.

Les fronts, générant de bonnes rafales à 35 nœuds, se sont succédés au-dessus de nos têtes pendant 48 heures au gré des fluctuations du baromètre, alors qu’on bénissait cette aire de repos tombée à point nommé au milieu du chemin, qui, peu confortable qu’elle était à marée haute, n’en était pas moins bien plus agréable qu’un voilier à gérer dans les grains, les vagues et sous la pluie.

Le taud de pluie nous a permis de remplir les réservoirs, l’éolienne a tourné pour qu’on regarde des films… Ne manquait plus que le wifi, mais non, rien à faire, la boulette n’a rien capté du tout.

On en a profité pour faire le bilan des restes au frigo : comme on prévoyait que les autorités tongiennes nous le vident, on a fait des tas de gâteaux avec le beurre et les œufs qui nous restaient. C’est bon, les gâteaux, surtout en mer !!

Puis les GRIB nous ont annoncé du vent dans le bon sens, donc on a quitté notre aire d’autoroute, direction les Tonga, pour de bon cette fois. Les leurres miraculeux de Callipyge ont encore ramené deux gros thazards (Isidore et Joachim, qui gisent en partie dans des bocaux de conserve) et un énorme mahi-mahi fougueux qui a réussi à se décrocher pendant que je découpais un de ses collègues, pensant que, déjà tout jaune, il ne ferait plus long feu. (Un mahi-mahi, c’est bleu normalement, et ça change de couleur en mourant, en passant par du jaune et en terminant par une teinte terne à l’opposé du bleu fabuleux de départ).

bonjourJoachim.jpg

Bonjour Joachim ! T'as de beaux yeux, tu sais ?

Sur la fin du trajet, nous avons également vécu notre journée la plus courte. Le 9 août a duré 33 minutes à bord de Schnaps, car nous avons traversé la ligne de changement de date le 8 août – devenu le 9 – à 23h27. Tomtom, qui n’était pas de quart à ce moment-là, s’est octroyé une journée entière de sommeil, le luxe.

Les deux derniers jours, nous avons poussé Schnaps malgré le vent faiblissant, pour arriver à Nuku’alofa avant l’heure de fermeture des formalités. Pari réussi de peu : on a cassé le petit cochon le 11 août vers 17h en échange de deux papiers inutiles (125 dollars tongiens, soit environ 50 €, pour les ministères de l’environnement et de la santé réunis, qui attestent pour l’un qu’on a annoncé n’avoir plus de vivres frais – ben oui j’ai planqué le dernier saucisson – et pour l’autre rien du tout, mais ce dernier est le plus cher, hein, un peu de logique tout de même).

Les stats de Tomtom :
– 1461.0 milles parcourus sur le fond
– en 12 jours de mer, pile poil
– soit une moyenne de 5.07 nœuds
– plus grande distance en 24h : 153.4 milles
– et plus petite distance en 24h : 56.3 milles, juste avant d’arriver à Beveridge


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4 comments to Raiatea > Tonga

  • François TABARY

    Coucou Thomas et Claire,
    Bravo les navigateurs ! Vous avez fait encore plus vite que mes estimations de mon dernier mail, soit deux jours plus tôt : je pensais que vous arriveriez aux Tonga au début du WE. Evidemment, je me plante à chaque fois car je ne connais rien à vos conditions de navigation. Tant mieux.
    Content de savoir que vous êtes à bon port, et merci encore pour ce compte rendu détaillé avec son humour rafraîchissant. Profitez bien des tropiques avant de descendre vers le sud et la rigueur de l’hiver néo-zélandais !
    Grosses bises.
    François

  • Delphine

    Joachim est vraiment beau!
    Des bisous

  • Delphine

    Il est beau Joachim. Mais est-il bon?
    Des bisous

    PS : Votre site Internet vient de m’écrire « Vous envoyez vos commentaires trop rapidement. Calmez-vous. » quand j’ai cliqué sur laisser un commentaire. « Calmez-vous »????
    haha

    • Clairette

      Mais oui il était très bon Joachim. En plus on a fait durer le plaisir, car il a fini en partie en conserve !!
      Bisous aussi
      Et ne te calme pas, il dit n’importe quoi notre site des fois

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